L’importance des mèmes

Tout ce qui est imité dans une culture est un mème. C’est donc beaucoup plus qu’un template imgflip.

C’est important de parler la langue d’un pays. Si on ne la maîtrise pas du tout, on se coupe de ses habitants. Si on ne la maîtrise pas suffisamment, on risque le cringe.

Old, but gold :

Idem sur internet. Si on considère qu’internet est un pays, sa langue est le mème.

La définition du mème

cf. wikipédia, le mème est un élément de culture reconnaissable, reproduit et transmis par imitation.

De la même manière que le gène est le code qui permet de reproduire des organismes biologiques, le mème permet de reproduire des organismes culturels.

Voici quelques exemples :

  • Des comportements : se faire la bise pour se dire bonjour, trinquer avant de boire, écrire un post LinkedIn par semaine (lol), …

  • Des mots : “karen”, “boomer”, “stacy”, “stan”, “chad”, “normie”, … omniprésents sur internet

  • Des mouvements artistiques : peindre avec des formes géométriques (cubisme), peindre en limitant le réalisme et en insistant sur l’impression qu’on laisse au spectateur (impressionnisme), …

Et on pourrait continuer longtemps : jeter du riz sur les mariés, faire une pendaison de crémaillère, citer OSS 117 cent cinquante fois par jour quand on est en école de commerce, …

Tout ce qui est imité ou réutilisé dans une culture est un mème. C’est donc beaucoup (beaucoup) plus qu’un template imgflip.

Prolongement de l’analogie avec la génétique

En poussant un peu l’analogie entre la génétique et la mémétique, on peut transposer quelques concepts génétiques intéressants sur la mémétique :

  • Dérive mémétique → à quel point un mème est modifié lors de sa transmission

  • Inertie mémétique → la propension d’un mème à rester identique lors de sa transmission (corrélé à la dérive mémétique du dessus, évidemment)

  • Méméplexes → mèmes dont la portée est étendue lorsqu’ils sont ensembles (e.g religion)

(à nouveau, je tire ces concepts de wikipedia)

Théorie des graphes et propagation virale

Revenons à une sous-catégorie de mèmes—celle qu’on connait le mieux : le mème internet.

Le mème internet est un peu comme un virus qui se propage sur les réseaux sociaux. Or un réseau social peut se modéliser comme un graphe et il existe des modèles pour étudier la propagation des virus sur les graphes, comme le modèle SIR :

copyright: Fragiskos Malliaros, professeur à centralesupélec.

Quand on applique ces modèles aux maladies, c’est pour tenter d’en minimiser la viralité. Quand on les applique aux mèmes internet en revanche, on cherche à la maximiser.

Bref, les mèmes internet — des images drôles, en apparence anodines—, se trouvent à l’intersection entre culture internet, sociologie, théorie des graphes, et modèles de propagation virale.

Meme marketing

Puisque les entreprises ont investi internet et que c’est là que l’essentiel de leur marketing s’y déroule, je pense que les entreprises devraient en parler la langue.

Or, je le disais plus haut, la langue d’internet, c’est le mème.

Voici un bel exemple avec Chirp qui a utilisé le mème de la Karen avec brio (Karen = mère de famille, dans la classe moyenne, paranoïaque, parfois tyrannique, auto-proclamée “attachiante”) :

J’insiste :

  1. le marketing viral est du pain bénis pour les marketeux : le message se propage de lui-même sans qu’ils aient à payer pour sa distribution. Or, l’humour augmente la viralité (comme la colère, le choc, …). Donc ça vaut le coup de s’intéresser aux mèmes puisqu’ils se veulent humoristiques dans 95% des cas. CQFD

  2. s’il y a bien une cohorte démographique qui parle le mème, c’est la gen z. Or, la gen z est dans la vingtaine, gagne de plus en plus d’argent et devient un segment de consommateurs réellement intéressant. Voilà pourquoi les entreprises devraient se préoccuper de parler leur langue.

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